Pour se remettre les idées en place à propos de la directive européenne EUCD et de sa transposition en France, on lira avec intérêt les documents sur EUCD.info !
Avec un collègue, afin de manifester nos inquiétudes sur le plan professionnel des effets évidents qu'entraînerait la loi telle qu'imaginée actuellement, nous avons soumis ce petit texte au BIOP, bulletin intérieur (hebdomadaire) de l'Observatoire de Paris, à paraître le mercredi 7 décembre 2005.
La situation est grave. Comme certains d'entre-vous le savent peut-être déjà, le gouvernement a décidé de faire passer en urgence au parlement à la veille de Noël le projet de loi DADVSI (Droit d'Auteur et Droits Voisins dans la Société de l'Information) qui retranscrit (en la durcissant) la directive européenne EUCD (European Union Copyright Directive) issue de traités OMPI (WCT et WPPT 1996).
Ce projet de loi ubuesque contenait déjà nombre de dispositions attentatoires aux libertés individuelles (voir le site EUCD.info). Par exemple, sans supprimer la taxe pour copie privée que nous payons sur tous les supports (CD, DVD, DD, Clefs USB, ...) ce texte vise à réduire le champ de l'exception pour Copie Privée du Droit français. cf par exemple (selon une jurisprudence récente, cette taxe nous autorise à copier pour usage privé, outre les oeuvres achetées dans le commerce, un CD emprunté à la médiathèque, un DVD au video-club ou toute musique téléchargée (le Download est légal, pas l'Upload, cf explications sur le forum de internet))
D'autres effets prévus de ce projet de loi concernent la restriction du droit de lire. Les CDs et les DVDs étant désormais protégés par DRM (DVD, cf protection par CSS ou zonage; CD cf le cas Sony/BMG), vous ne pourrez les lire que sur des systèmes autorisés, donc propriétaires, puisqu'il sera illégal de tenter de contourner les mesures techniques de protection, même si vous êtes légalement propriétaires du CD ou du DVD ! Enfin, des bibliothécaires sont inquiets de conséquences de la DADVSI, de même que les WebRadio, mais ceci sort du champ de ce message.
Mais maintenant, voila que Vivendi Universal, la SACEM et la BSA veulent en plus imposer un amendement qui pénaliserait tout logiciel pouvant servir à l'échange de fichiers protégés par le droit d'auteur et qui n'inclurait pas de mesures techniques pour l'empêcher (technologies de Digital Rights Management ou DRM).
Voici ce projet d'amendement tel que le cite EUCD.info (Amendement Sacem/BSA)
Les technologies DRM, qui reposent sur le secret, sont clairement incompatibles avec le logiciel libre dont le code source est librement accessible. Cet amendement conduirait donc à interdire tout logiciel libre permettant l'échange de fichiers protégés par le droit d'auteur (même si ce n'est qu'un usage détourné et non une fonction première).
Seraient en particulier visés les serveurs web et ftp que nous utilisons tous les jours à l'observatoire et qui sont dans leur quasi-totalité des logiciels libres. Si ce texte venait un jour à entrer en application, les administrateurs de ces serveurs accessibles à l'extérieur de l'établissement seraient probablement contraints à les retirer. Nous disparaîtrions donc du web comme beaucoup d'autres établissement scientifiques sauf à déployer en remplacement des logiciels propriétaires incluant des protections techniques que Micro$oft ou autres s'empresseront de nous vendre à un prix probablement astronomique (vu que nous n'aurions pas d'alternative). On peut même se demander si les outils de courrier électronique ne pourraient pas tomber dans ces usages détournés possibles !
Étienne Vogt, SIO et Alain Coulais, LERMA